mercredi 23 juillet 2008

Le jour où tout a changé..


On est en 2002 et je suis âgé de 15 ans, bientôt 16. Je vais bientôt rentrer en 1ère scientifique. Bouffer des cours incompréhensibles de Sciences et Vie de la Terre, faire mon premier et unique voyage aux Etats-Unis à ce jour et, surtout, connaître mes premiers émois sexuels.

En attendant, faut se coltiner 2002. Violente éruption de boutons en janvier. Sévère recalage par Fabienne en Mars. Le Pen au Second Tour en avril, le 21 je crois. Heureusement que l’été allait arriver. Comme chaque année, j’allais profiter au maximum du système français afin d’égayer mes vacances. Ma mère étant infirmière et travaillant encore dans le service public à l’époque, je pouvais partir vers des destinations capables de faire rêver n’importe quel français moyen titulaire d’un dossier de surendettement. Et à moindre coût. La Grèce s’offrait donc à moi en août 2002. Les îles, Athènes, le Parthénon, Zeus, l’Olympiakos…Sympathique. Ceci dit, en ces temps de véritable disette sexuelle, c’était davantage la carrosserie des jeunes filles qui m’accompagnaient qui attiraient mon regard que les colonnes de pierre conçues par je ne sais quel philosophe homosexuel il y a je ne sais combien de temps. On est plein de préjugés à 15 ans aussi.

Finalement, cette colonie était une semi-arnaque. On était un minable groupe de 15 adolescents. Certes, nous étions placés dans un lieu idyllique mais que faire quand 6 des 8 filles présentes sont maquées et que les restantes n’auraient pas leur place dans le tableau de chasse de Christophe Alleveque ? Alors, on sympathise entre burnés. On charie le plus poilu. On taille celui qui enchaîne le plus de rateaux. C’est souvent le même qui essuie les plâtres. Cependant, on fait parfois des rencontres déterminantes.

Faut savoir qu’à ce moment là, j’en ai encore rien à foutre de la musique. Mon truc c’ était le cinéma. Mes potes s’amusaient à me sortir des titres de film et à me demander qui était le réalisateur. Je me souviens les avoir épaté en sortant Renny Harlin pour « Au revoir, à jamais ». Niveau musique, c’était zéro. J’allais pas plus loin que ce qu’il y avait à la maison. Par chance, ma mère n’avait pas trop mauvais goût et j’ai très tôt découvert l’œuvre de Marvin Gaye, Phil Collins, Queen ou encore Sade. Mais en terme d’émotions, c’était pas grand chose en comparaison de ce que je pouvais ressentir en regardant Nicolas Cage s’éteindre dans « Leaving Las Vegas » (Mike Figgis à la réalisation).

Cet été, deux mecs plaisaient particulièrement aux filles. Y compris aux maquées. Deux noirs qui parlaient de plusieurs choses toutes la journée sans que je n’y comprenne un traître mot. J’entendais des noms de basketteurs qui me disaient vaguement quelque chose, quelques mots en créole et un semblant de la musique qu’ils écoutaient lorsque le volume de leur walkman était poussé à fond. Je compris rapidement qu’il s’agissait majoritairement de rap, un peu de R&B. Avec le recul, on ne peut pas dire d’eux qu’ils étaient des spécialistes. A ce moment, c’était suffisant pour m’impressionner. La musique partait et ils semblaient transportés, ne plus faire attention à ce qui les entourait. Je croyais être totalement indifférent au rap mais la passion qui semblait les animer avait quelque chose de fascinant. Et d’attirant.

Au fur et à mesure, je commençais à sympathiser avec eux. C’est vrai, c’était bien plus simple après pour adresser à la parole aux filles les plus âgées. Ils avaient tous deux ramenés une dizaine de compilations. De gros marqueurs noirs annonçaient sur des Cd’s gravés des titres telles que « Rap, été 2000 » ou encore « Best of Notorious B.I.G ». Plusieurs titres m’avaient marqué. Impossible de me souvenir de tous précisément. En vrac, « Da Rockwilder » de Redman et Method Man et « Oh Boy » de Cam’ron m’avaient bien plu. En réalite, le meilleur était à venir.
Pour toute personne qui ne connaît strictement rien au rap, Tupac est une sorte de mythe. Un « truc » indéfinissable dont les grands parlent en termes éminemment élogieux. On ne sait pas ce que ça vaut, à quoi ça ressemble mais c’est obligatoirement génial. Surtout depuis que ce Thug de malheur avait eu la mauvaise idée de s’en aller un 13 septembre 1996. Moi, j’étais comme tous les néophytes. On m’en avait parlé. Un de mes meilleurs potes, Paul, avait un fond d’écran sur son PC représentant un tag de Mr Shakur avec la devise « Live by the gun, die by the gun » (oui, oui, c'est bien l'image que vous voyez plus haut) inscrite dessus. Un jour, durant cet été, Nathanael, un de mes deux pygmalions, presse play. J’entends les premières notes de piano. Un piano étonnament chaud suivi d’un chanteur qui semble murmurer des mots que je ne parvenais pas à comprendre. Puis, c’est le choc. Un mec commence à rapper. Une voix à part. Rien à voir avec celle de Nelly que mon collègue m’avait fait subir tout l’après midi, « Hot in Herrre » oblige. Je comprends pas ce qu’il dit, je vous l’ai dit, je n’avais pas encore foulé la Terre de l’Oncle Sam. Ah si, au début il commence par « Come on , come on ». Naïf, je demande qui est donc la personne qui s’est emparée du micro.
« Là ? Mais c’est Tupac ! T’es séché en rap mon gars. » Je me suis gardé de lui dire que le seul album que j’avais acheté cette année là s’appelait « Te amo Italia », une compilation regroupant quelques uns des plus grands tubes de la chanson italienne.
« Ah, c’est ça Tupac… ». Je me suis dit que si Tupac c’était ça, j’aimais bien Tupac.

Le morceau s’appelait « Changes ». Plus rien ne sera comme avant.

6 commentaires:

Unknown a dit…

ton stylographe envoie mon ami. après le cinéma et le son, t'as pas pensé à écrire des nouvelles ?

un admirateur

Mehdi a dit…

Les nouvelles, je les garde pour the never-ending story :)

Amine a dit…

Très belle histoire :)

somno a dit…

1/ Je croyais pas que t'étais si jeune que ça niveau rapologique. Etonnant.

2/ Putain de bien écrit avec le rythme qu'il faut.

3/ Bonus track : voilà les google ads associées à l'article :

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Aircoba a dit…

C'est quand même assez fascinant ce que je viens de lire. "Changes" a eu à peu près le mec impact sur moi. C'est avec ce morceau que j'ai découvert aussi Tupac. J'écoutais très peu de rap à l'époque (2002-2003 à peu près comme toi), IAM, NTM et pas beaucoup de ricain finalement. Un de mes potes en terminale arrêtait pas de me répéter "mais c'est Dieu, tu comprends pas ?" Il me faisait rire. Un peu plus tard dans l'année, celle qui allait devenir ma première petite amie m'envoie ce morceau sur MSN. "Changes, c'est ma préférée de Tupac" m'écrit-elle... Je le découvre véritablement comme ça. Je connaissais de nom mais rien de plus. Tout comme toi, les notes de piano et le "come on come on", ça m'a vraiment marqué. J'en suis presque nostalgique quand je la réécoute, le début de la chanson me fait toujours un petit quelque chose. Voilà, ça c'est dit. Bien cool ton article, je vais me balader un peu plus loin.

Anonyme a dit…

Salut !

Ecoute j'ai adorer ton recit ...

sa ma fait penser, a quelque personne dans ma life ... et meme un peu moi ^^

voila, bravo j'adore ton blog, jai plusieur fois eu l'impression que tu parle de ce que je connai ... ;)